Certaines émissions sont difficilement ou même tout à fait inévitables avec des approches conventionnelles. La Confédération estime que les émissions résiduelles difficilement évitables s’élèveront environ à 12 millions de tonnes en Suisse en 2050. Les procédés dits de « captage et de stockage du carbone » (carbon capture and storage - CCS) permettent de capter ces émissions, de les transporter et de les stocker. Parallèlement, les principales sources d’émissions – usines d’incinération des ordures ménagères et cimenteries – produisent des quantités presque aussi importantes de CO2 provenant de sources biogènes. Si l’on capte ce CO2 et le stocke durablement, on obtient des émissions dites négatives (ou retrait du CO2). Les technologies CCS et les infrastructures de transport et de stockage du CO2 sont des éléments importants pour parvenir à la neutralité carbone de la Suisse.
Des conduites pour l’élimination du CO2
Il n’existe encore aucun site de stockage géologique en Suisse. Le potentiel est en cours d’évaluation. On peut cependant supposer que les possibilités de stocker durablement du CO2 en Suisse seront très limitées. Une grande partie de ce CO2 devra donc être transportée à l’étranger.
Voilà pour l’évaluation technique – mais pour qu’il puisse y avoir une mise en œuvre à grande échelle, certaines questions réglementaires doivent encore être clarifiées. Nous jugeons donc tout à fait positif le fait que la CEATE-E utilise les travaux sur l’élaboration de la politique climatique pour la période de 2030 à 2040 et, dans une motion, charge le Conseil fédéral d’élaborer un projet de législation générale sur le captage, le transport et le stockage du CO2.
La mise en place d’une infrastructure de transport, une préoccupation centrale des branches concernées
Compte tenu d’un volume prévu de 8 à 10 millions de tonnes de CO2 par an devant être collecté, transporté par des pipelines et stocké, la logistique jouera un rôle central. La tâche est complexe dans la mesure où il faudra mettre en place une infrastructure de collecte mais également s’assurer que le CO2 puisse être transporté de manière économique jusqu’aux sites de stockage. Il est évident que ce transport ne pourra se faire par le rail ou la route que dans une première phase. À long terme, le passage à grande échelle ne sera possible que si l’on crée un réseau de conduites. En dehors des questions réglementaires, ceci devrait constituer le principal défi dans la mise en œuvre.
Le rôle de l’État
La mise en œuvre, tant au niveau national qu’international, mettra l’État à forte contribution. D’une part, la facturation correcte du stockage durable à l’étranger devra être garantie par des accords entre États ; d’autre part, l’État jouera un rôle important dans la réalisation des infrastructures de transport nécessaires en Suisse.
C’est aux branches concernées qu’il reviendra d’assumer l’essentiel du passage à grande échelle. Celles-ci – notamment l’industrie du ciment et les usines d’incinération des ordures ménagères – y sont tout à fait disposées. Il leur faut toutefois un cadre juridique stable pour réaliser ces infrastructures coûteuses et de long terme. Le développement d’une infrastructure d’élimination du CO2 s’inscrit ainsi dans la tradition d’autres grands projets d’infrastructure tels que les chemins de fer et le réseau routier, lesquels n’auraient pas non plus vu le jour sans des conditions-cadre nationales appropriées
Des modalités de financement respectant le principe du pollueur-payeur
Une étude de l’Office fédéral de l’environnement estime que le développement de l’infrastructure de transport nécessaire d’ici 2050 coûtera environ 6,6 milliards de francs et la technologie de captage environ 9 milliards de francs. Pour que les entreprises puissent supporter ces investissements, il faudra définir comment les coûts de l’élimination du CO2 pourront être répercutés sur le pollueur. Seule la Confédération, avec les branches concernées, pourra le faire. Dans l’idéal, cela devrait intervenir progressivement – au même rythme que le développement des infrastructures. C’est pourquoi il est si important que la Confédération et les branches travaillent ensemble.
La Confédération peut également jouer un rôle important concernant le financement des installations. Il va falloir répondre rapidement à la question de l’optimisation du financement. L’engagement de la Confédération sera crucial dans les premières phases de planification car c’est à ce stade que les risques liés aux projets sont très élevés.
Harmonisation des procédures cantonales
De nombreuses compétences en matière de transport et de stockage dans le sous-sol relèvent des cantons. Il faudrait qu’il y ait une harmonisation la plus large possible entre les cantons car le transport et le stockage feront intervenir souvent plusieurs cantons. Il faudra également s’assurer que les cantons disposent des compétences nécessaires pour garantir la mise en œuvre. Lorsque ce n’est pas le cas, une mise en œuvre par l’État devra être envisagée.